Voici un texte que j’ai écrit pour  mes copines. Je les voyais toutes à se ruiner la santé en travaillant d’une manière déraisonnable. A plus de 50 ans, la vie des femmes actives peut devenir l’enfer. Le chemin direct vers la maladie ou la déprime.
Alors en lisant pas mal de chose sur le cerveau et en y réfléchissant, j’ai eu l’idée de leur proposer une sorte de Weight Watcher’s des « Kilos de travail en moins », une méthode pour diminuer le nombre de tâches pénibles quotidiennes.
Je relis mon texte et je pense qu’il est encore d’actualité.
Je n’ai pourtant jamais osé de leur en parler. Comme nous sommes en période des vacances et tout le monde lit toute sorte de navets pour se détendre, en voilà un…

Chaque jour, nous nous infligeons un lot de souffrance, je dis bien nous et pas nécessairement et exclusivement  ‘les autres’. Si on accepte l’idée que nous sommes à la source d’une partie de nos souffrances et pas uniquement notre entourage, il est possible de changer cette situation.
Il faut d’abord se poser la question, si nous ressentons qu’un changement serait souhaitable, sinon,il n’ y a qu’à continuer.
Nos activités professionnelles occupent du matin au soir notre énergie et donc même en lisant tous les livres à la mode sur le bien-être, la méditation et la recette du bonheur, nous ne les appliquons pas. Car ces livres proposent encore et encore des tâches en plus, du temps à trouver pour se faire ‘du bien’, que nous essayons empiler sur notre journée actuelle déjà bien remplie.
C’est justement ce qu’on ne sait pas faire, trouver ce foutu temps ‘en plus’ pour se faire du bien. Le point de départ n’est pas donc de pratiquer des choses en plus, mais en moins. En observant les mécanismes, en s’observant tout court, il est possible de changer.

Souvent, en discutant avec mes amies, elles se disent coincées dans une situation professionnelle, sans issue. Elles sont considérées comme trop vieilles pour trouver un autre job. Elles ont encore trop de contraintes financières pour risquer de se trouver sans rien avec les parents âgés à charge et /ou les grands enfants qui font des études, un engagement de loyer ou de crédit trop lourd.
Les systèmes de mobilité dans les grandes entreprises sont pensés pour les moins 50 ans où l’entreprise est encore prête à investir en formation. Les plus de 50 ans sont poussés dehors, mais souvent on les charge d’abord comme des mules. Jusqu’à la dernière goutte de force, jusqu’à prouver qu’ils ne tiennent pas le rythme. Ainsi, on peut faire croire qu’ils ne sont plus aussi efficaces qu’avant et qu’ils méritent finalement ce traitement.
Puis, les sages, les coachs et les psychologues nous disent qu’il faut savoir s’accepter comme on est, avec nos défauts. Il est donc facile de conclure que si les autres nous blessent, agressent ou humilient, c’est encore nous qui n’arrivons juste pas à bien maitriser les émotions. Que nous manquons du recul. En somme, c’est encore chez nous où ça coince…J’en connais un rayon sur la culpabilité de ce type…

Vous ajoutez à cela : fin de carrière perçue, enfants quittant le foyer, encadrement au travail par  la génération XYZ qui, légèrement désorganisée et inexpérimentée, se rattrape en travaillant la nuit quand un être normal qui a bien bossé la journée devrait dormir. Ces nouveaux chefs pas très matures, qui ont aussi parfois le don de mépriser les anciens, les périmés, « de l’autre siècle » pas natifs du numérique.
Les entreprises, surtout les plus grandes, ne sont pas faciles à bouger et à transformer pour s’adapter au changement actuel de l’économie et à la révolution numérique. Elles sont souvent en pagaille ou carrément en panique. Luttant contre la crise et anticipant le tsunami des nouvelles concurrences elles cherchent les portes de sortie. Les chefs ont chopé massivement la maladie de la réorganisation fréquente. Cette chimère de ‘mise en mouvement salutaire’ par le bordel permanent, selon les modèles abscons fonctionnels, rhizomiques, agiles, paticipativo-truc, en mettant de poufs partout comme dans les start-up au milieu des ‘open-space’ invivables. Tout ceci dopé avec les services informatiques à l’autre bout de la planète. Plus rien ne marche sans faire un ‘ticket’ comme à la CAF en 1980, mais dans un outil informatique hyper moderne, qui conduit généralement à l’annulation dans le tuyau de la demande lors de son voyage vers le service en Inde, à cause du décalage horaire. Au mieux, le ticket trois fois refait conduira à une réparation d’ici 1 mois, mais qui ne marchera pas bien.
Le grand ‘remuage’ organique et orgasmique où plus personne n’est surtout responsable de rien, tout le monde serre les fesses, attend qui sera le nouveau chef pendant 6 mois, n’ose plus rien faire et ceci recommence 6 mois après. L’entreprise accélère sans cesse le rythme des projets, sans budget et délais adéquats et par conséquence augmente surtout le nombre de réunions  et d’outils informatiques de coordination (la nouvelle organisation agile et rhizomique en consomme beaucoup). On oublie la qualité et le client, mais on en parle beaucoup. Car, on augmente le nombre de score-cards de mesure parlant de la satisfaction de la Sainte trinité Salarié-Client-Actionnaire. Les tableaux sont au vert, car on sait fabriquer les KPI, ces mesures ‘essentielles’, dosant correctement le bullshit pour cacher la misère. On like massivement (et si possible le premier !) les tweets du chef pour monter qu’on est aussi numérique et moderne que les plus jeunes. Et on promet encore plus chaque trimestre à la bourse en se demandant où on pourrait encore couper une branche.

Je crois que nombreuses entreprises seront tout simplement incapables à faire face à la vague de tsunami, cet immense mur de flotte qui risque dans quelques années engloutir un grand nombre d’activités qui avait le vent en poupe en 1990. Incapables de muer, trop grandes comme des dinosaures. Il y aura plein d’enterrement à la Kodak en devenir.

Dans ce contexte, les entreprises de la « vieille » économie sont actuellement devenues démagogique, méprisent tout sauf le 30-45 ans ‘natif Internet’ en croyant que ce rajeunissement à tout prix apportera miraculeusement une innovation miracle, surtout si on se débarrasse de toute l’expérience des anciens.
Mes amis de plus de 50 ans, voir 55 ans et qui ont parfois encore 10 ans à travailler sont au cœur de cette pagaille et pas à la bonne place. Alors pourquoi continuer à s’esquinter ?

Parce que notre génération a été formée dans le culte de la performance, du bien faire, du sens du devoir, du dépassement de soi, du « jamais assez bien ». Nous avons appris à culpabiliser devant l’inactivité. Nous les femmes actives et indépendantes avons entrepris le parcours parfait de mère, de conjointe et de collaboratrice ou directrice, tout à la fois et tout parfait. De quoi disjoncter à 50 ans.
Nous sommes des meilleures candidates au burnout, à la dépression, aux migraines violentes, à des symptômes de douleurs chroniques : dos, hanches, épaules, eczémas, zona, douleur au ventre… les maladies professionnelles du début de 21 siècle.

Combien de mes copines ont évité un des symptômes ? Sur l’ensemble de la petite liste, j’ai eu droit au 3 symptômes avant 50 ans. Et ça m’a fait réfléchir. Quelques années à se remuer les méninges. J’ai décroché comme un alcoolique progressivement du travail et j’ai remodelé totalement ma vie. Tout le monde ne peut pas suivre la même démarche, mais tout le monde peut perdre quelques mauvaises habitudes et larguer quelques kilos de travail inutile.
Comme pour un régime, il faut dix minutes par jours pour écrire le menu, c’est la prise de conscience lucide qui fait une partie du résultat.
Alors que faire. Personne ne se lève le matin en se disant, je veux que ma journée soit une journée de souffrance ! Et pourtant, on commence à la manière d’un alcoolique à accomplir notre travail avec les mêmes erreurs inconscientes.
Il y a des moments de grâce, des moments où on ressent cette paix intérieure, mais trop rarement. Nous sentons pourtant confusément qu’il faudrait augmenter le nombre de ces moments privilégiés.

Alors la question que je me suis posée : est –il possible de changer ?
Si c’est en pratiquant notre quotidien toujours de la même manière, la réponse est non.
On ne peut pas choisis ce qu’on est, mais il est pourtant possible de souhaiter de le changer.
Ce souhait est évidemment peu efficace, si on ne passe pas à l’action. C’est comme se dire qu’il faudrait faire du sport, apprendre un instrument et jamais s’y mettre…
Il faudrait donc faire un entraînement régulier pour changer ? Or, comme j’ai déjà dit, je n’ai jamais réussi à suivre la moindre méthode des livres sur le sujet de la quête du Graal de bonheur… On peut donc vite conclure, qu’il faut juste faire avec, avec soi-même et apprendre juste à accepter. Or ceci ne me satisfaisait pas du tout.
C’est en lisant les livres sur la dernière recherche sur la neuroplasticité du cerveau, mon esprit cartésien a trouvé la réponse à la question de faisabilité. Ce n’est pas un leurre. C’est faisable d’augmenter le nombre de sensations agréables quotidiennes de mon cerveau, comme il est possible de maigrir progressivement, de se remettre à faire du sport. Il est possible, à n’importe quel âge, de diminuer notre dysfonctionnement en se libérant du cercle vicieux de hyperactivité, d’agitation, de fatigue chronique et d’autre souffrance mentale. Car le cerveau est « plastique » et il s’adapte encore et encore, même après 50 ans…
Et en plus, ce n’est pas égoïste, car d’être plus heureux parmi les autres et aussi un gain important pour notre entourage.
La question est ensuite comment inscrire ceci dans la réalité.
Le premier but est de démasquer la cause quotidienne de la souffrance. Mais, plus important est de déterminer ce qu’on a créé soi-même comme contrainte, sous prétexte que c’est le Bien ou même pour notre Bien, alors qu’en réalité, ce n’est pas du tout la source de nos sensations agréables.
Donc s’observer agir, observer nos mécanismes de pensée, comment se forment nos émotions (joie et souffrance). Je parie qu’on passe souvent des journées complètes à déployer une énergie folle à faire des choses qui ne procurent aucune satisfaction. Vous me direz alors, mais s’est bien la vie qui nécessite qu’on remplisse la paperasse, les tableaux Excel pour le chef, les rapports d’activités, qu’on fasse le ménage, le repassage ou je ne sais pas quelle idiotie désagréable.
Le principe de rester dans la réalité signifie qu’on peut aller mieux sans toutefois envoyer tout valser, s’expatrier, divorcer, claquer la porte au travail, dormir dans la rue, ne plus se laver, ne plus sortir les poubelles et vivre dans une porcherie. Disons que c’est peut être une solution, mais qui ne me remplissait pas personnellement de sentiments agréables…
Comme toute activité, entraîner son cerveau, son mental, il vaut mieux de petits progrès réguliers qu’un grand succès une fois. Et il faut persévérer et le cerveau change par une pratique quotidienne…c’est ça l’idée.
En tout cas, c’est ce qu’ils disent les scientifiques ‘pro’ de la plasticité du cerveau, pas moi. Notre esprit peut être donc notre pire ennemi, comme notre meilleur ami. Il faut s’en préoccuper comme on s’occupe de ses chevaux, ses dents, ses ongles, ces yeux…
Il faut pendant 15 minutes par jours à s’entraîner à changer ce foutu état mental qui nous rend débordé. Ce n’est pas beaucoup, vu ce que ceci peut rapporter.
Alors que doit-on pratiquer : une chose en plus ? Alors qu’on est déjà proche du burnout ?
Non, des choses en moins.

Et il faut aussi de la méthode. Pour éviter de se mentir. Et finir par faire plus…

Quand j’ai voulu maigrir, ma diététicienne m’a demandé de noter mon menu par écrit quotidiennement. Le simple fait d’écrire m’a fait découvrir à quel point je transformais inconsciemment mes souvenirs en occultant les écarts. Croyant d’avoir craqué 2 fois par semaine sur un dessert, en réalité s’était 4 fois. En étant persuadée d’avoir mangé plein de légumes, mes repas étaient à 80% composés de féculents. C’est fou qu’on puisse se la raconter…

Une autre chose que j’ai observée. Nous sommes champions pour déguiser par les activités incessantes notre véritable source de souffrance. On s’assomme par des veines activités, sans en recevoir le bonheur, mais en se disant qu’on doit le faire pour le bonheur (le sien ou des autres). Aucune lucidité.

Pour mes copines, j’ai pensé que la façon la plus pragmatique était de se concentrer sur les éléments très présents dans leur vie : diminuer la charge de travail et mieux gérer pour cela les relations de travail.
Diminuer la charge de travail, faire moins, pour faire autre chose mais uniquement si ceci procure les sensations agréables immédiates du cerveau personnel. A chacune de trouver quoi, de mieux. Je ne rentre pas dans ces intimités cervicales.
A moi de donner les trucs pour faire moins de travail, tout en étant en réalité mieux perçu par les autres au travail.

La méthode pour y arriver : ‘ne pas faire seul’, mais de manière connectée, en s’entre-aidant. Comme pour le problème des kilos en trop, des séances de Weight Watcher de l’Etat mental des condisciples.
Le but : perdre les kilos de travail.
Dix minutes par jour, il faut faire un rapport aux copines pour voir ce qui a marché et ce qui a foiré. Pour se soutenir et avancer « groupieren ».
Les thèmes sont obligatoires.
Partons de l’idée simple : diminuer la charge de travail=moins de stress=moins d’émotions nocives=on rentre plus tôt.

La règle unique : Chaque gain de temps ne doit pas être immédiatement absorbé par une autre tâche SAUF si elle procure réellement une sensation agréable à mon cerveau à moi!

« J’utilise ce gain quotidien du temps pour me créer des sensations agréables dans mon cerveau qui dispache là où il faut. «

Une contrainte :
« Je ne fais toutefois toujours bien le  travail que je fais. »

L’idée n’est pas de se faire éjecter pour faute grave !

Cible : Comme je connais bien mes copines qui sont toutes de grosses bosseuses, les exercices sont spécialement pensés pour elles. Des faignantes natives ne sont pas conviées. Ils et elles n’ont pas besoin de l’aide. Leur cerveau se débrouille déjà très bien.

Les exercices s’articulent autour de 5 devoirs quotidiens :
1. J’apprends à refuser les tâches et je réussi réellement à refuser poliment des tâches

  1. Je supprime des tâches de mon agenda que j’y ai mis moi-même
  2. Je redistribue des tâches
  3. Je fais à 80% au lieu de 110%, mais je communique plus sur ce que je fais
  1. J’apprends à différer, certaines choses finissent entre temps par se résoudre partiellement seules

Pour finir:
J’ai  élaboré une série d’exercices à suivre quotidiennement avec un point par e-mail/tél…
Des outils, des dialogues types de refus de travail…